vendredi 11 septembre 2009

Arctic Monkeys - "Humbug"


Arctic Monkeys

Les Arctic Monkeys sont décidément un cas à part, loin de la mélancolie et de la grisaille quotidienne qui composent le (mauvais) rêve éveillé d’une bonne partie de leurs jeunes semblables de Sheffield. Car ces singes là, eux, sont au cœur d’un véritable tonnerre, notamment au sein de leur troisième album, le bien nommé Humbug (pagaille).


Même si le groupe s’est façonné, sur ses deux précédents albums, un son bien reconnaissable, il est désormais question d’évolution, de maturité. Maturité qui se faisait déjà entendre sur le side-project d’Alex Turner (chanteur/parolier), le bienveillant Last Shadow Puppets, avec ses mélodies et ses arrangements raffinés, faisant plus référence à Scott Walker (dandy burlesque des 60’s) qu’à la scène rock anglaise actuelle.


C’est donc Josh Homme, leader du groupe Queens of The Stone Age, homme orchestre et exploitant pétrolier musical moderne, qui, à défaut de ne pas projeter des boules de feu de son cul – pour faire ainsi honneur à sa réputation - a su capter les singes dans son laboratoire fantastique du Nevada. Il a apporté un son épais à sa façon, si violent et si tranchant qu’il fait passer les deux albums précédents du groupe pour une simple introduction.


C’est donc armés de boots et de coupes de cheveux à la baba cool fan de Black Sabbath (influence revendiquée pour ce disque) que les Arctic Monkeys introduisent leurs nouvelles cavalcades électriques façon vaudou british. Exemple avec ce « Crying Lightning », single complexe mais pas compliqué, emmené par une basse saccadée sur fond de mélancolie noire latente, qui laissera béats tous les détracteurs du combo les trouvant trop « ados ».


L’ensemble du disque est très cohérent, les chansons se suivent et s’accordent entre elles, avec des mélodies qui se complètent sans jamais se ressembler. Le chant de Turner s’inscrit dans une continuité british très romantique, perdu entre un Liam Gallagher sobre et un Morrissey sexué.


Le premier titre, « My Propeller » est d’une finesse déconcertante, avec son arpège ravageur, mais tout en retenue, qui rappelle la scène rock de Seattle des années 90. « Dangerous Animals », qui suit de près, choque par sa maîtrise et son rythme obsédant, où l’on entend, en fin de compte, une petite bande de freluquets s’éclatant dans les studios de Monsieur Homme.


« Secret Door » fait office de synthèse parfaite entre la verve mélancolique des Smiths, et la sensibilité d’un Peter Doherty période The Libertines. Très british également, le touchant « Cornerstone », single en puissance que l’on jurerait extirpé d’un album solo de Morrissey. A noter que les 2 titres en question sont produits par James Ford, déjà aux manettes sur les deux albums précédents.


Le reste du disque est plus troublant encore, comme « Fire & The Thud », pépite à l’instru extravagante, avec réverbérations et backing vocals à tomber, le tout dans une retenue mélodique déconcertante. Cette chanson – n’ayons pas peur des comparaisons hâtives réservées à la presse anglaise – ferait presque référence à un « I am the Walrus » moderne des Beatles. Plus lourd en tension, le titre « Dance Little Liar », où l’on sent la patte (rousse) de Homme, rappelle beaucoup les Queens Of The Stone Age, avec ce rythme typique du groupe, et ses habillages sonores éclatants.


Les deux derniers titres ouvrent la voix à l’avenir, notamment l’incroyable « Pretty Visitors », décharge violente presque heavy aux rythmes changeants, avec son riff écrasant et ses backing vocals genre magie noire, le tout emballé par un orgue que les Iron Butterfly n’auraient sûrement pas renié. Probablement l’un des morceaux les plus intéressants du disque.


Le bouquet final, « The Jeweller’s Hands », est un titre très psychédélique absolument sublime avec son arpège haut au piano, le tout emmené par cette basse typique, puis magnifié par des riffs délicats que l’on croirait tout droit sortis d’un vieux disque des Zombies.


Une étape est donc franchie avec ce troisième album, car les Monkeys ont su opter pour le choix périlleux du progrès et du renouvellement. Le groupe a donc réussi à éviter le piège voix/guitare/basse/batterie – piège auquel d’autres n’ont jamais réussi à échapper (allo les Stone Roses ??) – tout en gagnant en originalité.


Le groupe creuse donc un fossé immense avec la concurrence (Arcade Fire inclus), et signe un disque qui, en plus du succès commercial, sera sans doute une référence pour le genre – le genre Arctic Monkeys donc !




Arctic Monkeys, Humbug, Pias / Domino, 2009

Arctic Monkeys, "Crying Lightning" (clip).


D.S.

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