lundi 14 septembre 2009

Martin Parr au Jeu de Paume




L’exposition de Martin Parr au jeu de Paume se partage en trois étapes. La première partie, la plus réjouissante, nous fait découvrir l’univers personnel de Parr et ceux qui l’ont influencé.


Sa collection de photos documentaires (la plus importante collection privée de tirages britanniques) est impressionnante et nous laisse entrevoir l’Angleterre des années 60 à 90. On retiendra Graham Smith pour ses portraits sociaux poignants en noir et blanc mais aussi Tom Wood dont les photographies en couleur et au flash nous rappellent clairement le travail du photographe de Magnum. Au fil de l’accrochage, nous découvrons des tirages de figures majeures du documentaire telles que William Eggleston, Robert Frank ou son ami Gilles Peress. Au milieu de la pièce, des livres de photo qui retracent l’histoire du médium – certains sont même signés Cartier-Bresson ou Araki.


Mais Parr se veut aussi découvreur de jeunes talents et passe beaucoup de temps à les dénicher. Notamment au Japon d’où il a ramené quelques extraits du travail de Rinko Kawauchi, loin du formel documentaire des précédents et plus conceptuel avec cette photographie d’un corps nu recouvert de milliers de mouches.


Si cette collection de tirages est impressionnante, il n’y a plus de mot pour qualifier les objets kitchs, ringards et de mauvais goût exposés dans des vitrines comme d’importantes œuvres d’art que le photographe accumule depuis plusieurs dizaines d’années.


Et si ces objets sont amusants, ils marquent aussi leur époque : l’ère Thatcher avec des assiettes à son effigie, le début d’une collection très réussie d’Obama, du slip aux boîtes de céréales en passant par les tongues et les préservatifs. Mais les grands gagnants ex-æquo sont définitivement le 11septembre2001/ Saddam Hussein et il est difficile de savoir par où commencer la description tellement il y en a. Tapis de prière musulmans brodés de tours jumelles enflammées, montres « en or » par dizaines où le portrait de Saddam apparaît derrière les aiguilles, cendriers « wanted Bin Laden », canif, assiettes en porcelaine, presse-papier et marionnettes ne sont que les exemples du monde de sur-consommation dans lequel on vit, preuves d’un grand n’importe quoi !


L’enchaînement avec le nouveau travail de Parr va donc de soi puisqu’il nous entraîne dans le monde luxueux des riches de notre planète. On avait oublié, grâce à la première partie, notre peur au ventre d’avant l’exposition, que Parr fasse encore du Parr et c’est pourtant le contraire qui nous déçoit. Ce n’est ni par ses cadrages ni par l’utilisation de son flash qu’il grossit les traits de ces mondains comme il le fait si bien d’habitude. C’est peut-être parce que les protagonistes de ses images sont déjà des caricatures d’eux-mêmes qu’on ne retrouve pas la patte (finalement espérée) du photographe. Il semble juste être un œil amateur lâché dans un univers auquel il n’appartient pas. Et ça se sent. Parler des riches en allant à Dubaï ou à Longchamp pourquoi pas, le photographe l’a déjà très bien fait en allant dans le fin fond de l’Angleterre pour parler des « working class ». Pourtant on ressort de « Luxury » avec le sentiment un peu niais que ce travail photographique ne nous a rien appris que l’on ne connaisse déjà, déçu de la vision pastiche et naïve de l’homme des classes moyennes.



“Planète Parr”
La collection de Martin Parr
du 30 juin au 27 septembre 2009
Galerie du Jeu de Paume, Paris

Anaïs Dombret

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